BRUXELLES RESTE LE TERRAIN DE JEU PRIVILÉGIÉ DES LOBBYISTESEn seulement six mois, plus de 4 000 rencontres ont eu lieu entre les hauts responsables de la Commission européenne et les représentants d’intérêts. Majoritairement du secteur privé. C’est ce que montre une étude de Transparency International grâce à la mise en place d’un outil de suivi des pratiques de lobbying dans l’Union européenne.Le siège de la Commission européenne à Bruxelles.Stevenallan / istockOn pouvait s’en douter. C’est désormais démontré. Les décideurs européens accordent plus de temps aux lobbyistes représentant les entreprises et les industries qu’aux ONG ou aux collectivités locales. L’ONG Transparency International a mis au point un outil, EU Integrity Watch, qui permet de suivre les pratiques de lobbying au sein de la Commission européenne. 75% des rencontres avec le secteur privé Depuis le 1er décembre 2014, les commissaires européens, les membres de leurs cabinets et les directeurs généraux de la Commission européenne sont tenus de publier dans un registre leurs rencontres avec les différents représentants d’intérêt. L’ONG a ainsi épluché ces documents, de décembre à juin. Sur les 4 138 rendez-vous déclarés par les décideurs européens, 75 % concernent des lobbystes du secteur privé (entreprises, fédérations professionnelles et consultants). 18 % des rencontres se font avec les ONG, 4 % avec les think tank et 2 % avec les collectivités locales.L’association patronale européenne Business Europe a par exemple été reçue 42 fois par les commissaires européens. Parmi les entreprises les mieux implantées au sein de la Commission, on trouve Google, General Electric ou encore Microsoft avec en moyenne trois à quatre rendez-vous par mois. Ces entreprises figurent également parmi les organisations qui déclarent les plus grosses dépenses de lobbying à Bruxelles, avec plus de 3 millions d’euros dépensés par an pour chacune d’entre elles. »Les données des six derniers mois suggèrent qu’il y a un lien fort entre les dépenses déclarées et le nombre de rendez-vous obtenus », souligne Daniel Freund de Transparency International UE. « Les organisations qui ont les budgets de lobbying les plus conséquents ont un accès important aux décideurs publics. Cela est particulièrement vrai sur les dossiers Finances, Numérique et Energie », poursuit-il.D’après les chiffres collectés par l’ONG, les entreprises ayant obtenu plus de dix rendez-vous déclarent avoir dépensé au moins 900 000 euros en lobbying, à l’exception d’Airbus qui a obtenu 25 rendez-vous et a dépensé 400 000 euros.Les dossiers qui suscitent le plus d’intérêt concernent le climat et l’énergie (487 rendez-vous), l’emploi et la croissance (398), l’économie numérique (366) et les marchés financiers (295). Cependant, les trois commissaires en charge de ces sujets ont déclaré un faible nombre de rendez-vous avec la société civile, qui représente moins de 8% du total de leurs rencontres.Parmi les ONG les plus rencontrées, il y a Oxfam et Greenpeace avec une vingtaine de rencontres entre décembre et juin, et 29 pour le WWF. Mais celles-ci se font souvent sous la forme de tables rondes, déplore Transparency International. Par ailleurs, de nombreuses organisations sont absentes du registre. C’est le cas de 14 des 20 plus grands cabinets d’avocats internationaux, qui sont pour la plupart enregistrés sur le registre des représentants d’intérêt de Washington. Seul 1 % des responsables européens concernés Si Transparency International salue les efforts de transparence menés par la Commission sur l’action des hauts responsables, elle déplore le faible impact du dispositif sur les autres membres de la Commission européenne. En effet, le dispositif mis en place depuis décembre ne vise que 1 % d’entre eux et 20 % des lobbyistes enregistrés. « Des responsables publics de rang inférieur, par exemple les négociateurs du traité de libre-échange transatlantique (TTIP), ne sont pas visés par ces obligations. » L’ONG appelle à ce que tous les représentants publics publient une « empreinte législative pour restaurer la confiance des citoyens ».

Source : Novethic Bruxelles reste le terrain de jeu privilégié des lobbyistes